Ils étaient différents, ensemble, jusqu'à la fin. Ils prenaient la vie comme elle leur venait, main dans la main. Ils étaient frères et sœurs selon la loi, mais bien plus selon leur cœur. Ils s'aimaient d'un amour que l'on ne peut définir. De cet amour qui vous pousse au pire, à vous jeter d'une falaise, à vous trancher les veines, à vous détruire sans retour. Pour l'autre, toujours pour l'autre. Le monde, le monde, c'était qu'un ramassis de conneries, des mots qui s’enchaînent, des promesses en l'air. Vous n'aviez confiance qu'en vous même. Vous étiez seuls contre le reste du monde, imbattable, et pourtant si beaux, si forts que vous paraissiez explosez d'une lueur nouvelle sous le coucher de soleil accueillant la nuit. Vous brûliez d'une vivacité que personne ne comprenez. C'était fou, c'était si accrue, ce lien qui vous unissez, vous assemblez dans la danse d'un jour, la danse de toujours.
Un jour, vous vous êtes rencontrés. Un jour, la petite fille apeurée a parlé. A lui, le solitaire à la grande gueule. Vous vous êtes unis, dans un sentiment d'impunité, dont vous seuls connaissez à présent le secret. C'était grandiose, une explosion de couleurs, de sensations plus imposantes les uns que les autres. Prudence, elle a toujours suivi son frère de cœur, son amant, son amour, son tout. Elle n'a jamais parlé qu'à lui seul, son protecteur improbable. Il était le seul à la connaître, à la comprendre, et ce fut toujours ainsi. Ça l'est toujours. Et inversement, Angel personne le connaissait vraiment. Il avait beau gueuler au monde, il avait beau se dandiner dans les rues avec ces airs de durs, d'imbattables, de somptueux bad boy que l'on croise dans ces films impossibles. Il n'y avait qu'elle qui saisissait la complexité de son caractère. Ouais, sa clope au bec, ses airs je-m'en foustiste, son sourire en coin qui les charmaient tous, sa capacité inébranlable à draguer toutes les filles qui lui passaient sous la main, c'était que du pipot. Il suffisait de se pencher un peu plus sur son cas, et on comprenait qu'il était plus que ça. Mais, il n'y avait que Prudence qui avait eu la sagesse d'esprit de le faire. Et depuis, ils étaient liés. Pour l'éternité. Ils dansaient sous les éclairs, ils vivaient au jour le jour, comme connectés. C'était étrange et improbable, une sensation de chute et d'immortalité. C'était si intense, si dément. Au début, ils se contentaient de leur mains enlacés, de leurs sourires complices.
Puis, un jour, ça n'a plus suffit. Et alors, ils se sont embrasez, et embrassez dans un même élan. Un élan qu'ils ne pouvaient contenir, malgré ce que leur hurlez la loi et ses blabla. Ils ne faisaient plus qu'un, leurs souffles se sont confondus. C'était si fort qu'ils peinaient à respirer, à continuer à vivre l'un sans l'autre. C'était des sommets, des montagnes. Inséparables créatures sous une pluie de sentiments vivaces. Des chandelles étincelants dans la nuit noire.
Ensemble contre le reste du monde.
Ensemble jusqu'à la fin de leur existence.
C'était si beau d'y croire, si beau d'y songer.
Mais, au fond, ce n'était que des instants de bonheurs volés à la vie, trésors que l'on enserre en des pleurs qui vous déchire le cœur, vous brise en milles et uns fragments d'amertumes et de ressentiments.
Prudence, elle s'y attendait, à cette fin. Pas de happy end, pour elle. Elle suffoquait, elle avait si peur qu'elle en tremblait, si peur qu'elle se serait tué.
Alors, elle est parti. Elle a abandonné son ange. Sa Prudence lui a été arraché. De la plus cruelle des manières. Il ne sait pas où elle se trouve, si elle va bien, si même elle est en vie. Depuis son départ, le temps s'est arrêté. Mais, il n'a jamais désespéré, il n'a jamais apaisé son amour quant bien même il ne se lasse pas des bars. Il a voyagé aux quatre coins du monde, dans l'espoir fou de la croiser, sa poupée au regard bleu océan. Il le sait, un jour, il la retrouvera. Il ne l'oublie pas. Sans elle, il n'est qu'une étoile qui s'éteint peu à peu dans ce ciel si sombre. Mais, aux yeux des autres, il brille encore d'une lueur bien plus accrue que les autres. Seulement, une nouvelle fois, ils sont si loin de la vérité.
Ils sont si loin de ses pleurs silencieux, de son cœur déchiré et de ce besoin de la serrer contre lui, avant qu'elle ne lui échappe une nouvelle fois.
Mais, alors que tous les espoirs s'étaient évaporés dans les ténèbres de l'amertume, alors qu'il était prêt à se diriger vers l'Italie, premières origines de la jeune demoiselle, il l'a entrevu. Se dirigeant vers son avion, l'avion de la solitude. Ses yeux se sont illuminés et il a alors su où elle se trouvait. Nuuk. Les grands froids, le lieu le plus incertain où il paraît improbable de réchauffer son âme brisé. Il s'est alors envolé à sa suite, au plus vite.
Coïncidence du moment, il sait qu'il va enfin la retrouver, il le sent, comme un sentiment urgent, un besoin imminent. Ce n'est qu'une question de temps.